Panama avec Franck-Olivier

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La vie de tous les jours change du tout au tout avec l’arrivée de Franck-Olivier (FO).

Le style est différent, taxis, restaurants, hôtels sont monnaie courante pour lui. Comme mon budget ne peut pas vraiment suivre ce rythme, FO deviendra un des mécènes de mon projet, pour le plus grand confort de mon corps fatigué. Dix jours de vacances donc se profilent devant nous, nous voulons croquer dedans à belles dents !

Le vélo se trouve chez une membre de Hospitality Club pour autant de temps que j’ai besoin. Lui aussi mérite des vacances.

Notre choix se porte d’abord sur les îles San Blas, Isla Diablo.

Nous découvrons après quelques heures de 4x4 et de speedboat, un véritable petit paradis sur terre. Cocotiers, sable blanc, eau chaude transparente, le tout sur 500m de long à peine. Quelques cases abritent 4 ou 5 familles de Kunas.

Juste en face de nous, 300m à peine, Isla Perro, plus petite, plus vierge encore, nous tends les bras pour quelques brasses et quelques heures de snorkeling sur une épave aux poissons colorés.

Je renoue avec ma passion de la plongée, longtemps mise au rebut. Ma nouvelle vie sera aquatique, pour au moins la partie Pacifique, il est temps de me réentrainer.

Je resterai bien là quelques mois, mais FO a déjà la bougeotte, c’est comme ça les citadins !

Notre deuxième bonne idée est de réaliser un vieux rêve de mon compagnon d’aventure : traverser le canal de Panama en voilier.

Vu que je commence à m’y connaitre en démarchage de voilier-stop, nous filons à Shelter Bay marina près de Colon.

Pas de chance, à peine sorti du bus, le temps pour FO de s’éloigner quelques mètres pour prendre une photo, un type à sale gueule se jette sur lui pour piquer son appareil photo. FO le retient par le bras, range son appareil tandis que l’autre sort un couteau de sa poche. Rapide comme l’éclair, FO le prends à la gorge et le traine vers moi sur plusieurs mètres, il est chaud Francky !

Complètement entouré, il fait mine que rien ne s’est passé. Calmement mais rapidement nous fuyons la zone pour nous réfugier à Shelter Bay Marina, beaucoup plus sûre et loin de la ville gangrené de criminalité, l’une des plus dangereuses des continents américains apprenons nous par la suite.

En moins de 24h, nous trouvons un voilier prêt à nous embarquer. Le vaisseau Tregoning vient de Gainesville, Floride, aux Etats-Unis. J’y avais étudié une année en 2001, il n’y a pas de hasard…

Randall et Alison nous embauchent à bord en tant que « linehandlers » pour la traversée de deux jours du canal. C’est une des règles du canal d’avoir au moins quatre linehandlers à bord, en plus du skipper et du pilote affrété par la compagnie du canal, l’ACP.

Le job consiste simplement à s’occuper de l’une des quatre amarres reliant le bateau aux quais des écluses. Quand l’eau monte ou descend, il faut alors tirer ou donner du mou à l’amarre. Nous on se marre.

Nous passerons d’abord l’écluse de Gatún, divisée en 3 bassins. Ce soir là, le ciel semble vider toute son eau sur nos têtes ravies de l’expérience.

Au moment de l’action, deux dauphins sortent de l’eau à quelques mètres de l’arrière du voilier, regardant amusés nos têtes d’ahuris.

Devant nous s’avance majestueux un énorme cargo Panamax. Nous passerons les 3 bassins avec lui, juste derrière. Lorsque ses hélices se mettent en marche, d’énormes tourbillons malmènent notre petite embarcation, nous tenons alors très fort nos lignes qui semblent bien dérisoires face à un tel monstre.

Les portes noires immenses, semblables à celles de la Moria dans « le seigneur des anneaux » se referment doucement sur nous. Le moment est d’anthologie, nous quittons l’océan Atlantique pour replonger plus loin dans le Pacifique.

Nous passons la nuit sur le lac Gatún, et passons en fait la plus grande partie du canal le lendemain.

La traversée doit être faite au moteur, en gardant une vitesse minimum de 6 nœuds si l’ont peut. D’énormes cargos nous passent et dépassent, si proches, si puissants. Nous admirons alors le travail gigantesque effectués par des armées de travailleurs il y a bientôt cent ans. 22.000 travailleurs français sont morts dans la première tentative de creuser le canal, emportés par la malaria et la fièvre jaune. Le pauvre Ferdinand de Lezeps, grand architecte du canal de Suez, dût abandonner le chantier aux étatsuniens.

Ceux-ci utilisèrent le lac Gatún avec un système de 3+3 écluses élevant les navires à 28m au-dessus du niveau de la mer, au lieu de l’idée préalable des français de creuser le canal au niveau de la mer.

Aujourd’hui des travaux importants d’élargissement du canal sont en cours pour creuser un système d’écluses parallèles plus larges afin de faire passer des cargos encore plus gros que ceux de la norme Panamax, déjà gigantesques. Le progrès !

Le trafic du canal donne une très bonne notion du développement global de la société de consommation. C’est aussi un excellent indicateur de la bonne ou mauvaise santé de l’économie mondiale. Et bien il semble qu’on n’est pas prêt d’arrêter de consommer tout ces trucs idiots qu’on nous vend à tort et à travers !!!

Les écluses de Pedro Miguel et de Miraflores terminent nos aventures du canal et nous plongent dans les eaux troubles du coté Pacifique. Nous passons sous le fameux pont des Amériques reliant l’Amérique du Sud à l’Amérique du Nord. FO est aux anges, le reste de l’équipe est ravi de même.

Notre capitaine Randall et sa femme Alison nous offrent de rester à bord deux nuits de plus, offre que nous acceptons avec grand plaisir. Le calme de la vie de plaisancier semble avoir gagné FO aux tendances normalement hyperactives. Nous les remercions par un plat de lasagnes ‘mouse’, une chose que je rêvais depuis tellement longtemps.

Lorsque Franck-Olivier reprends l’avion ce matin je réalise une fois de plus à tel point ma vie de bohème ne m’a pas gardé de la douleur des adieux. J’espère le revoir sur chaque continent en tous cas.